Mes chers frères de l’association Synergie-Congo qui m’accordent une fois de plus cet espace, et vous aussi amis et sœurs qui avez répondu à notre invitation, recevez je vous prie mes vifs remerciements.
Je suis heureux qu’il ait parmi nous d’autres frères africains qui pourraient nous éclairer lors du débat. Car si le thème se focalise sur l’homme politique congolais, je crois pouvoir dire que le même problème se pose aussi dans nombre de pays frères. En tout état de cause, c’est toujours une bonne chose que d’entendre ce que les autres pensent de vous.
Aujourd’hui j’ai pensé vous entretenir d’un sujet qui à priori peut étonner, choquer ou irriter compte tenu de la diversité des opinions. Par délà mes observations sur le devenir de notre pays je me suis senti interpellé par une pertinente interrogation: le politicien congolais est-il un homme libre ? C’est justement le thème de ce jour. Est-il libre de ses pensées, de ses actes, de son avenir, de son propre être enfin ?
Si le sujet arrive à susciter de l’étonnement, un choc ou une quelconque irritation de la part d’un chacun de nous pour raisons diverses, il pourrait se justifier par le désastre que traverse notre pays. Quand l’étonné dira: mais de quoi veut-il nous entretenir ? Ne sommes-nous pas un pays indépendant et souverain ? Le choqué lui ou l’irrité conclura probablement en ces termes: non mais on devrait empêcher un esprit aussi tordu de venir perturber la quiétude d’honnêtes gens.
Certes nous sommes pour la plupart des gens honnêtes et nous pensons vraiment du bien pour le Congo, mais force est de constater que nous populations congolaises ne sommes maîtres de notre propre destinée. Si nous étions maitres de notre destinée nous ne croupirions pas dans cette misère noire indescriptible compte tenu de l’immensité des ressources naturelles dont le pays est pourvu, nous ne nous rencontrerions pas ici et là à travers le monde pour essayer de débattre sur la liberté réelle de nos dirigeants ou sur la souveraineté de notre pays ; nous ne serions même pas partisans de l’alternance qui n’a d’importance, à mon avis, que lorsqu’on se butte à l’incompétence et bien sûr à l’autoritarisme. Nous ne sommes pas maîtres de nous-mêmes parce que le politicien à qui incombe le rôle de nous libérer n’est pas lui-même libre.
Chers frères, soeurs et amis, si donc le politicien congolais n’est pas libre, il ne peut être qu’esclave comme je pense le demontrer. Esclave de quoi, esclave de qui ? Ainsi avant de voir plus loin ce qu’il en est, il est de bonne grâce d’essayer de définir le mot. Reléguant l’étymologie du mot esclave au second plan, seule sa définition nous importe ici. Et j’ai choisi la définition de l’Academie francaise; elle définit donc l’esclave comme, ”une personne qui n’est pas de condition libre, qui appartient à un maître exercant sur elle un pouvoir absolu; elle poursuit pour une meilleure compréhension en disant que, ” l’esclave peut dépendre de toute autorité: personne, groupe, organisation ou État.”
Par analogie, l’esclave est donc l’état ou la condition de ceux qui sont soumis à une tyrannie, à une autorité arbitraire. Si nous prenons le mot esclavage au sens figuré, il se définit, ”comme l’état d’une personne qui par intérêt ou par goût se met dans la dépendance d’une autre et suit aveuglement ses volontés”.
Le politicien congolais se retrouve-t-il dans cet état ? A chacun selon sa conscience de répondre à la question. Pour ma part, jusqu’à ce que l’on me convainque de mon erreur, le politicien congolais reste un esclave. Mais il le nie quelquefois pensant tromper l’opinion publique alors que celle-ci vit au quotidien cet état d’esclavage. Il est esclave et essaye de ne pas y penser et feint de ne pas y croire; et pourtant il le sait et cela lui colle à la peau. On ne se débarrasse pas de son état d’être par un subterfuge mais par la confrontation de son état effectif à la réalité assourdissante. Dans son livre Sentences en prose Johan Wolfgang von Goethe dit: ” Nul n’est plus esclave que celui qui se croit libre sans l’être”.
Chers frères, soeurs et amis, du moment que l’on est esclave de gré ou de force, on l’est entièrement sur tous les aspects de sa vie. Mais l’on se contentera des aspects politique, culturel et économique. Toutefois avant de le faire, laissez-moi la possiblilité de souligner que le maître de l’esclave lui pour se protéger contre le qualificatif de barbare qu’il mérite en ce siècle où l’homme veut contre vents et marées, se définir comme moderne et civilisé, le maître, disais-je, en grand stratège, a modernisé l’état de son esclave.
L’esclave n’est plus attaché dans les cales d’un bateau où au rythme des tambours assourdissants et le sifflement du fouet avant de s’abattre sur son dos, il rame pour faire avancer le bateau de son maître; non, il est devenu capitaine du bateau; l’esclave ne porte plus de haillons et, la serpe ou la machette à la main, part à la collecte de caoutchouc, du coton ou de la canne à sucre de peur de perdre sa main ou sa vie. Non, il porte des costumes des meilleurs couturiers de la planète et est directeur des sociétés, ministres et président de la république. Sa gueule, l’esclave ne la ferme plus, il parle, abondemment même, il tient des discours et dénonce même les tares du monde sur des tribunes internationales. Quelle belle image d’émancipation de l’esclave ! Mais il n’en est pas moins un esclave et, lorsqu’il voudra dépasser le seuil de tolérance admis par le maître, il sera mis hors d’état de nuire.
Chers frères, soeurs et amis, voyons donc en quoi le politicien congolais est un esclave politique ; il l’est par son incapacité de pouvoir décider un sort bienheureux pour son pays; c’est une élite qui ne refléchit pas sur son passé. Un passé douloureux parsemé d’assassinats des compatriotes intègres qui voulaient le développement de leur pays ; ce passé qui devait constituer le fer de lance d’une contestation continue et d’une détermination soutenue dans la lutte pour l’indépendance réelle a produit au contraire la peur dans le chef de cette élite, et comme la peur seule ne suffit pas parce que susceptible d’être vaincue, il fallait la soutenir par l’achat des consciencesen vue de plonger dans la somnolence perpétuelle l’esprit critique inné en l’homme; c’est rarissime de trouver depuis les pères de l’indépendance un politicien congolais qui se soit levé au niveau national de meneur d’hommes ayant acquis son assise par la seule volonté des populations qu’il veut représenter; la plupart d’entre eux acquièrent par exemple le statut de député parla même formule d’achat de consciences lorsqu’ils distribuent circonstanciellement des biens parmi les populations désoeuvrées de la juridiction où il veut briguer un mandat ; Aussi n’est-on pas étonné que le député ne s’occupât des problèmes des populations concernées puisque –mais enfin- il avait acheté sa députation ! D’autres s’imposent grâce à la force militaire et distribuent par après un discours patriotique pour drainer derrière lui les masses, et d’autres encore sans honte ni vergogne disent que c’est l’Occident qui détient le pouvoir dans notre pays. Hélàs! c’est une vérité indéniable qui corrobore à elle seule notre thèse de l’état d’esclave du politicien congolais qui l’avoue d’ailleurs lui-même nous exonérant ainsi d’une polémique inutile.
Pour les compatriotes congolais je ne raconte d’histoires ici, mais pour vous frères africains sachez que depuis le coup d’Etat de Mobutu en 1960 juste après l’indépendance, le Congo a toujours été dirigé par des hommes politiques à la solde de l’Occident. Seul Laurent-Désiré Kabila a essayé de faire la différence mais a échoué.
Il est aussi un esclave culturel qui a épousé sans analyse les us et coutumes de son prochain; on pourrait certes retorquer qu’il a été obligé d’avaler la couleuvre. Mais l’est-il toujours ? Si oui, quand donc opposera-t-il son refus ? Mais revenons un peu en arrière pour illustrer mon argumentation: quand le colon a pénetré le monde africain il a trouvé et qualifié de barbare la coutume des scarifications qui identifiait d’emblée l’appartenance de la personne scarifiée à une tribu ou à un clan donné. Car la douleur que ce traitement inflige à l’interessé est purement et simplement gratuite, n’est-ce pas ?
Mais qu’est-ce qui se passe maintenant à travers le monde ? Ne voyons-nous pas le monde se tatouer pas seulement le visage comme le faisaient nos aînés mais tout le corps s’infligeant gratuitement de la douleur pour se complaire au siècle présent ? Est-ce de la barbarie ? Si oui, qui est barbare et qui ne l’est pas ? Si non, vous savez pourquoi on nous qualifiait des barbares. Et que dire de l’excision ou de la circoncision ?Pourquoi le premier est-il si fustigé tambours battants tandis que le second est toléré dans bien de pays ?
Mettons-nous d’accord tout de suite. Je ne plaide pas pour ces pratiques douloureuses et inutiles mais accomodantes pour certaines personnes. Non, je rélève seulement ce fait culturel pour la refléxion. On pourrait aller plus loin sur des affirmations de propagande ou plutôt de complexe de supéroirité où la barbarie africaine dans le temps passé a été le sujet de conversation dans des salons européens sur la soit-disante nudité des peuples d’Afrique. Mais que voit-on dans le monde dit civilisé ? La nudité n’est-elle pas devenue une valeur ? Si l’on se cache derrière la raison de la canicule, autant dire tout de suite que l’Afrique est devenue une région à climat temperé.
Au niveau de la réligion, chrétienne s’entend, on nous a inoculé une foi basée uniquement sur la recherche du bonheur celeste comme si Dieu a failli en nous mettant au centre de la Terre. Le comble est que nos dirigeants chrétiens sans discernement ont repris et véhiculent ce poison qui éloigne les chrétiens de l’amour et de la gestion de la Patrie et donne ainsi la part facile aux hommes sans foi ni loi. Qui peut bien gérer un pays si ce n’est celui en qui les enseignements de Dieu font vraiment ses délices ? Les exemples sont tellement légion que nous n’en finirons pas ; aussi arrêtons-nous là ! Nous avons aussi d’autres chats à fouetter.
Chers frères, soeurs et amis, avec la base scientifique qu’il a acquise après cinquante années d’études techniques, professionnelles et universitaires aujourd’hui l’homme politique congolais a la possibilité de rejeter de fausses valeurs et de s’identifier par rapport aux intérêts de ses populations et non de s’aligner sur des ismes, concepts, philosophies dont il ne connaît ni les tenants ni les aboutissants. Toujours derrière les refléxions d’un monde hostile à sa liberté, le politicien congolais ne peut innover; il voue solennellement sa vie et épuise en vain son énergie sur les études et concepts comme la démocratie pourtant connus dans nos sociétés dites traditionnelles, sociétésqui étaient plus démocratiques que les monarchies européennes de même epoque mais qu’on lui a arraché et jeté aux poubelles parce qu’elle s’opposait par son essence même au triomphe de la colonisation ; plus tard,c’est-à-dire de nos jours, elle sera( la démocratie) reintroduite pour raison de commodité idéologique et de leadership mondial sanspour autant laisser le choix au politicien congolais de la réexperimenter selon le paysage socioculturel de son pays ; du reste au moment où nous parlons la démocratie est devenue une conception obsolète et dûment en passe d’être remplacé par la ploutocratie.
L’aliénation culturelle, puisque c’est de cela qu’il s’agit, a brisé notre fierté et fait de nous des êtres inférieurs incapables d’initier un dévéloppement dans nos pays. Je vous prie d’excuser ma connaissance imparfaite de la langue francaise quand je ne puis trouver un terme approprié que l’aliénation culturelle ou mentale en vue de cerner l’attitude du politique congolais lorsque, toute honte bue, il cherche désespéremment à cacher à la face du monde l’invasion et l’occupation de son propre pays. Nos pères nous ont legué un pays libéré mais nous le clochardisons à nouveau. Un éminent africain illustre mieux mon propos. Il s’agit du professeur Cheik Anta Diop : « Je crois que le mal que l’occupant nous a fait n’est pas encore guéri, voilà le fond du problème. L’aliénation culturelle finit par être partie intégrante de notre substance, de notre âme et quand on croit s’en être débarrassé on ne l’a pas encore fait complètement. Souvent le colonisé ressemble un peu, ou l’ex-colonisé lui-même, â cet esclave du XIXe siècle qui libéré, va jusqu’au pas de porte et revient à la maison, parce qu’il ne sait plus où aller. Il ne sait plus où aller. Depuis le temps qu’il a perdu sa liberté, depuis le temps qu’il a appris des reflexes de subordination, depuis le temps qu’il a appris à penser à travers son maître ».A quand donc un concept de gestion politique purement africain et reflétant la réalité africaine ? Pardonnez-moi encore de citer un de grands historiens africains Joseph Ki-Zerbo qui dit s’étant longuement penché sur la question vitale de l’identités’écrie : » Sans identité, nous sommes un objet de l’histoire, un instrument utilisé par les autres, un ustensile ».
Chers frères, soeurs et amis, il est temps de nous faire violence en pensant plus nègre qu’hellène.
Le dernier aspect que j’aimerai parler est qu’il est esclave économique dépendant entièrement de l’autre. Du moment que le politicien congolais est incapable de s’identifier lui-même par rapport à ce qu’il doit être, point n’est besoin de s’alarmer là-dessus: il est condamné à son triste sort. Parce qu’il ne comprend ou ne veut pas comprendre que que tant qu’il n’alignera pas une politique économique basée avant tout sur sa propre productivité, grâce aux ingrédients locaux de son développement endogène, il ne pourra se soustraire du pouvoir de la main qui donne et que l’on sait qu’elle est celle qui dirige. Il préfère la facilité d’emprunts liés à des mesures draconiennes qui détruisent le tissu économique existant et appauvrissent de plus en plus les populations locales. Et souvent ces emprunts ne sont qu’à demi introduits dans lecircuit économique du pays tandis que le reste remplit les poches de ceux qui oeuvrent pour la pérennité de leur propre esclavage.
Pour ma part j’ai toujours pensé qu’on devrait allouer plus de budget dans le secteur agricole. L’agriculture est et reste le ciment d’une politique d’indépendance alimentaire, partant d’un début de réflexion puis de rejet de dépendance psychologique, politico-socio-culturelle et philosophique. Enfin il me paraît important de souligner la dangerosité de la doctrine du libéralisme économique telle que mise en pratique dans les pays d’Afrique ; car s’il ébranle déjà des Etats puissants plusieurs fois centenaires occidentaux comme nous le vivons maintenant dans l’Union Européenne, qu’en sera-t-il des nations africaines sous-développées qui se recherchent encore ?
Il ressort de quelques aspects que nous avons pu énumérer ici que la thèse d’esclave de l’état d’être effectif du politicien congolais est une triste réalité que l’on peut humainement abolir. Si donc quelqu’un est ou est devenu esclave soit par cupidité ou par paresse, ce qu’il a un maître qui le dirige. Et le Maître dans des circonstances actuelles du XXIème sièclene pensera jamais à mettre fin à cette situation puisqu’elle constitue et a toujours constitué le bouet de sauvetage des économies périclitantes des Etats prédateurs du monde. Eh oui, l’esclavage moderne, celui que subît le politicien congolais, revêt maintenant une carapace de liberté illusoire basée sur la stimulation de l’égo comme je l’ai déjà dit l’autrefois.
Le politicien congolais se veut ou se croit libre du moment que son maître lui suggère ou lui laisse le loisir de brader et de jouir avec extravagance â sa guise et sans son peuple des richesses de son pays. Lorsque vient le moment où le maître malgré lui veut temperer ses ardeurs par peur d’une révolution populaire qui viendra inéluctablement mettre fin à leur idylle, c’est-à-dire apporter le changement, l’esclave crie le holà et brandit hypocritement l’éternel document de chantage: le contentieux belgo-congolais. Le maître frémit de colère d’abord, puis se calme, essaye d’endormir son esclave et tenter par après de le remplacer par un autre esclave affamé celui-là qui doit de surcroît être plus docile. Ainsi se moquent des populations congolaises et le maître et l’esclave.
Chers frères, soeurs et amis, de nos jours la révolte reste l’ultime moyen par lequel l’esclave s’il se lasse des humiliations profondes et des manipulations pernicieuses du maître, s’il arrive à comprendre qu’on ne peut pas lui faire miroiter la promesse d’une richesse qu’il possède déjà, l’esclave disais-je, peut recouvrer sa dignité d’homme et changer le cours de son histoire.
Que l’esclave, le politicien congolais, s’imprègne des substances de cette expérience vécue par Mohandas Karamchand Ghandi: ”A l’instant où l’esclave décide qu’il ne sera plus esclave, ses chaînes tombent”.
Je vous remercie
Bababebole Kadite
Par Mr.Bienvenu K.Bababebole

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